Voyager. Et au cours de son voyage, écrire, ou dessiner, ou les deux. Garder une trace de ses pérégrinations. Pour en tirer quoi ? Un rapport administratif, une peinture, un roman, des portraits d’oiseaux de paradis, un objet d’art contemporain atypique… Le « carnet de voyage », à la fois livre de bord et aide-mémoire, est un genre littéraire et artistique difficile à cerner : il est d’emblée ambigu car il a recours à deux médiums très différents, l’écrit et le figuré. Le premier se taille souvent la part du lion, mais avec les artistes c’est le contraire… Ce numéro de 303 propose en filigrane une définition par petites touches du carnet de voyage, depuis le « Grand Tour » des jeunes gens fortunés du XVIIIe siècle jusqu’aux pérégrinations contemporaines de Laurent Tixador et Abraham Poincheval, en passant par Girodet, Signac, la photographie orientalite, Victor Hugo et Paul Gauguin… Où l’on voit que ce genre multiforme, riche d’un passé que l’on peut faire remonter aux cabinets des curiosités du XVIIe siècle, est aussi promis à un bel avenir : s’il a toujours été dans l’air du temps, c’est parce qu’il colle au plus près des deux composantes essentielles de la nature humaine, le besoin de découvrir l’Autre, l’Ailleurs, et l’envie de partager ses connaissances et son enthousiasme.