Acte irrémédiable par excellence, le crime inquiète, horrifie et fascine tout à la fois, qu’il s’agisse d’Abel et Caïn ou des gros titres des journaux les plus récents. L’idée que la société se fait de ce délit est pourtant en constante évolution : sa définition même varie, tout comme ses représentations, les fantasmes qu’il véhicule et la place qu’il occupe dans l’imaginaire, la morale, l’esthétique et la politique.
La tragédie classique, les romans et films policiers exposent d’innombrables assassinats, rapts et vengeances sanglantes ; à travers la peinture d’histoire et les faits divers, l’art académique et la culture populaire se les disputent à leur tour. Le premier en tire de hautes considérations morales, la seconde un plaisir trouble mêlant frisson et voyeurisme, mais tous deux font circuler des récits agissant comme de puissants révélateurs d’une réalité inavouable : sous la surface paisible du monde ordinaire, dans la maison voisine, dans nos désirs refoulés, remuent silencieusement d’obscurs secrets de famille, des images macabres, des conspirations ténébreuses.
En observant, comme des indices, ces multiples aspects du crime, considéré comme un fait à la fois social, historique et culturel, ce numéro spécial entrouvre la porte d’un monde interdit et fascinant, terriblement proche de nous.